La thèse d’Anna Voronina
intitulée: Nijni Novgorod: interroger le paradigme de la « ville-nature » à l’ère post-industrielle
sera soutenue publiquement le vendredi 10 octobre à 14h, dans l’amphi haut de l’ENSAG,
préparée au sein du Laboratoire de recherche Les Métiers de l’Histoire de l’Architecture, édifices-villes-territoire, école nationale supérieure d’architecture de Grenoble, dans l’école doctorale 454 Sciences de l’Homme, du Politique et du territoire.
En co-tutelle avec la Faculté d’Architecture et d’Urbanisme de l’université d’Etat d’architecture et de génie civil de Nijni Novgorod.
Devant le jury composé de :
– M. Valery Nefedov, Professeur, GASU de Saint-Pétersbourg (rapporteur)
– M. Frédéric Pousin, Directeur de recherche au CNRS, UMR AUSser n°3329 (rapporteur)
– Mme Chris Younès, Professeure, ENSA de Paris La Villette (rapporteur)
– M. Yves Chalas, Professeur émérite, Institut d’urbanisme, Université Grenoble Alpes
– M. Alesandro De Magistris, Professeur, Politecnico di Milano
– Mme Anna Gelfond, Professeure, GASU de Nijni Novgorod, directrice de thèse
– Mme Catherine Maumi, Professeure, ENSA de Grenoble, directrice de thèse.
Résumé
Les recherches sur la ville de Nijni Novgorod suscitent des interrogations au sujet de la « ville-nature ». Les spécificités de ce territoire, situé dans un autre contexte culturel, nous incitent à contester la généralisation d’un paradigme, celui de la « ville-nature ». Il s’agit de revisiter la ville russe contemporaine par la complexité des interactions entre la construction urbaine, conçue par l’homme, et les processus naturels.
Par le biais de la « ville-nature » nous repensons la ville et ses changements de conception : le passage d’une ville russe ancienne à la grande ville et à la ville socialiste. L’étude historique était essentielle pour comprendre le phénomène d’urbanisation et les origines des « natures » dans le milieu urbain, dont l’hétérogénéité résulte d’une séquence de bouleversements économiques et politiques. Nijni Novgorod — centre d’agglomération industrielle, pendant la période soviétique Gorki — est fortement marquée par l’industrie. La postsoviétisation et la désindustrialisation ont engendré une recomposition urbaine, en rendant la structure urbaine illisible.
Nijni Novgorod s’inscrit dans le territoire par des réseaux multiples dont la reconnaissance et la distinction, réalisées par une lecture stratifiée, à l’aide de la cartographie, mettent en évidence l’émergence du « vert » et participe à la qualification des espaces ouverts. « Sortir du vert » suppose de revisiter le rapport entre l’écologie et l’économie, ainsi que de reconsidérer la présence de la nature dans le milieu urbain par des activités économiques, des enjeux politiques et l’usage des processus naturels par l’homme.
La thèse est structurée en entrées thématiques afin de présenter la diversité des rapports que la Nijni Novgorod contemporaine entretient avec la nature. Tout d’abord, sa position à la confluence de la Volga et l’Oka a prédéterminé sa viabilité économique et en même temps a posé le problème de la complexité des conditions naturelles, l’hydrographie et la topographie notamment. En dépit de la réalisation de travaux d’aménagements pendant le XXe siècle, les sols urbains restent difficilement praticables et vulnérables aux processus naturels. Dans la recherche, les espaces ouverts et végétalisés, considérés jusqu’à maintenant non constructibles, sont revisités comme appartenant à l’infrastructure paysagère. Des principes nouveaux d’aménagement sont recherchés pour réorganiser les processus naturels afin d’améliorer la qualité des sols urbains ; le travail du paysagiste s’accorde avec celui de l’ingénieur. Ensuite, la planification stratégique des années 1930 a prédéfini la structure éparpillée de Nijni Novgorod, pensée pour les industries. L’incohérence urbaine résulte des contradictions apparues entre la conception de la ville socialiste unie et la décentralisation uniforme des industries. Les espaces verts conservent l’empreinte des changements sociaux brutaux, de l’inaction politique et des pratiques d’aménagement urbain par les propres moyens des habitants. Le déclin de l’URSS a entraîné l’abandon des grands parcs publics, dont les qualités se rapprochent de celles des terrains réservés pour les espaces verts qui ne furent jamais aménagés. Cependant, la pauvreté des parcs urbains est compensée par la richesse des formes d’agriculture urbaine et périurbaine. Le tissu bâti est composé d’une morphologie dite intermédiaire, incluant des parcelles pour des activités agricoles. Enfin, les processus actuels sont considérés à travers des pratiques d’aménagement qui accompagnent la régénération postindustrielle et l’installation des nouvelles activités. À Nijni Novgorod, la transition postsoviétique accorde de nouvelles données pour le projet urbain, or ce passage se complique par l’ancrage des dogmes soviétiques dans la pensée actuelle.
La recherche est réalisée à la rencontre des regards : architectural, territorial et paysager, par le croisement de méthodes différentes : l’histoire, la cartographie, le travail d’enquête sur le terrain.
Mots clés : Nijni Novgorod, Gorki, ville-nature, industrie/désindustrialisation, postsoviétisation, « vert »